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Magda et les cadeaux
Magda n’avait pas de parents, mais des oncles, des tantes, des grands-parents et leurs adelphes, des cousins et cousines à tous les degrés, bouillants ou glacés. Du côté de sa mère, en tous cas. Du côté de son père, elle n’avait que sa tante Bérénice, chez qui elle avait toujours vécu aussi loin qu’elle s’en souvienne.
Tous les ans, au moment de la Grande Fête, quand les nuits grignotaient les rares heures de soleil, si longues et si froides, la famille se rassemblait. Bérénice remplissait sa voiture de cadeaux – des dizaines et des dizaines, pour tous les membres de la famille maternelle de Magda – et se préparait, avec sa nièce, à s’immerger dans cet univers bruyant et joyeux.
Un jour, Magda avait demandé à Bérénice pourquoi elle faisait des cadeaux à tout le monde et pas juste aux enfants, comme les autres adultes.
Bérénice avait répondu : « parce que je peux leur faire des cadeaux, alors je le fais ; parce que j’adore faire des cadeaux ; parce que les adultes aussi méritent de déballer des surprises qui allumeront des étoiles dans leurs yeux », et elle avait ajouté, en chuchotant à l’oreille de Magda : « peut-être même plus que les enfants, parce que les adultes portent tout le sérieux du monde sur leurs épaules par amour pour leurs enfants et personne ne devrait porter autant sans avoir droit à un peu de joie ».
Alors Magda avait fait un gros câlin à Bérénice.
Comme tous les ans, la maison des grands-parents était remplie à craquer. Tant d’adultes et de jeunes, des oncles et des tantes et leurs partenaires et leurs enfants et des grands-oncles et des grands-tantes et leurs enfants et leurs enfants. À peine Magda et Bérénice passèrent-elles la porte que les cousines se jetèrent sur la fillette et l’emmenèrent dans la grande salle de jeux. Elles étaient bruyantes et énergiques, mais Magda les connaissait depuis toujours et vice-versa et il y avait un amour entendu entre leurs deux mondes.
Parfois, un regard interloqué, un froncement de sourcils. Parfois, une véritable incompréhension qui escaladait jusqu’au débat, avant, enfin, une résolution ou un compromis. Mais jamais de moqueries ou d’exclusion. Parce que les cousins et les cousines n’abandonnaient personne.
Alors il y eut des jeux de société, des jeux d’adresse, des jeux d’imagination pendant lesquels Magda restait en retrait – il n’y avait pas de règles dans ces jeux, alors elle ne savait pas trop comment participer : sans cadre, comment savoir où peindre ? Elle avait trop peur de faire des taches.
Et puis, finalement, le grand repas, avec la table des adultes et celle des enfants. Bérénice gardait un œil sur sa nièce, lui adressait sourire ou hochement de tête, lui rappelant que son étreinte pouvait toujours servir de refuge si nécessaire. Mais Magda était courageuse et elle voulait profiter comme ses pairs et montrer qu’elle savait se comporter en société.
Elle profita du repas, goûta de tout, ne finit pas tout, mais elle savait qu’on ne lui en voudrait pas, parce qu’on lui avait dit. À sa droite, Paula finissait son hachis abandonné dans un coin de l’assiette, à sa gauche, Jules avalait les tuiles que Magda trouvait trop croquantes. Le dessert réconcilia tout le monde.
La nuit enveloppait tout. Les bougies et l’arbre décoré, les voilages, les tissus, la salle remplie d’une mer de cadeaux. L’avantage d’une grande maisonnée comme celle-ci, c’était qu’on ne regardait pas chaque personne ouvrir ses cadeaux. Non, une fois la permission donnée, c’était un grand tohu-bohu, une chasse aux cadeaux, le but étant de trouver ceux qui portaient son nom. Magda trouva un cadeau pour Matthias et lui apporta, tandis que Rosine lui en donnait deux au sien, emballés dans le même papier brillant.
Sagement, Magda empilait ses trésors avant de les déballer. Elle voulait d’abord offrir le sien à Bérénice, un joli tour-de-cou qu’elle lui avait confectionné elle-même avec un tissu tout doux. Bérénice adorait les colliers, elle les collectionnait, en changeait souvent ou pas du tout. Il faut dire qu’elle avait un cou à colliers, long et fin. Sans collier, il existait avec grâce – et s’épanouissait sous les perles et les maillons, les sautoirs et les pierres.
Bérénice avait déjà déballé le tour-de-cou. Elle le portait. Il lui allait à merveille.
Soulagée, Magda s’attaqua à sa pile de cadeaux, ravie que l’attention d’autrui ne soit pas portée sur elle. Des exclamations ravies, des remerciements, même des hurlements de joie résonnaient autour d’elle. Son petit cœur battait d’anticipation. Elle savait qu’elle était difficile à satisfaire. Au moins, elle n’aurait pas besoin de feindre la joie sous les regards inquisiteurs, comme à son anniversaire – sa plus grande hantise.
Elle déballa le premier. Un livre. Puis un second livre. Un troisième. Son cœur dansait désormais la gigue. Un quatrième. Puis une robe toute douce et moelleuse, décorée de galaxies brodées – du côté extérieur, sans que les fils et les strass ne frottent contre sa peau. Une paire de grosses chaussettes assorties. Un bandeau bleu irisé pour aller avec. Et d’autres livres. Un atlas des étoiles. Et un télescope, de Bérénice.
Quand elle eut tout déballé, elle remercia diligemment chaque personne – avec des sourires, des bises, même des câlins. Puis elle alla se blottir dans les bras de Bérénice, se protégeant du bruit et du brouhaha sous son épaisse étole. Pendant que sa tante la portait à la voiture, elle lui murmura : « comment tu as fait ? pour que tous mes cadeaux soient parfaits – et pas que le tien ? »
Bérénice rit. Magda adorait le rire de Bérénice, c’était comme un cadeau de plus dans la nuit froide et silencieuse, après toutes ces émotions.
« Oh, presque rien ! J’ai juste rappelé aux adultes que le but d’un cadeau, c’est de faire plaisir à la personne qui le reçoit. »
Psst, n’oubliez pas de participer au jeu-concours qui finit le 31 décembre à minuit.
Et si vous ne l’avez pas fait, ce petit quiz très scientifique vous permettra de déterminer si Sublimes est fait pour vous !
das ist eine wunderschöne Geschichte, liebe Emma! Ich freue mich auf viele solche im nächsten Jahr - alles Gute!! Christl
Merci !