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Je me suis aperçue que depuis ma réponse de joie sincère, je t’ai parlé de moi… sans vraiment parler de moi.
« Mais qu’est-ce que tu racontes, Emma ? »
Eh bien, je t’ai présenté mes réflexions et mes recherches, pas tout à fait de façon objective, mais sans non plus rentrer dans mon intime tourmente.
La raison pour laquelle j’ai agi de la sorte s’explique sans trop de difficulté : révéler sa vulnérabilité, voilà une tâche complexe. Il est beaucoup plus aisé de montrer ses certitudes, de pavaner ses réussites, d’étaler ses découvertes… que d’accepter et de dévoiler ses vilains doutes, ses échecs quotidiens, ses jalousies irrationnelles.
Alors, aujourd’hui, je veux rouvrir un peu cette boîte de Pandore, parce que je me sens d’humeur partageuse… mais surtout parce que je sais que si tu me lis, c’est pour en découvrir davantage sur moi, et pas que sur ce que je suis fière de te présenter.
La jalousie
C’est elle qui me vient en tête la première, cette horrible jalousie, qui me met face à mes insuffisances, à cause de laquelle je me sens toute petite (enfin, plus que d’habitude).
Je me suis abonnée il y a peu à la newsletter d’une autrice française de fantasy et science-fiction, Cécile Duquenne, suite à une recommandation. Je n’ai lu aucun de ses romans, mais ça ne saurait tarder.
Et… Je ne vais pas te cacher à quel point il m’est difficile d’écrire ces mots, de réfléchir à la bonne façon de formuler ces pensées qui tourbillonnent dans ma tête… Reprenons.
Sa newsletter est géniale, très instructive. Cécile Duquenne propose également des masterclass sur l’écriture. Elle a publié son premier roman à 20 ans (j’en ai 28), elle a fait une thèse en littérature comparée (je voudrais faire une thèse moi aussi)…
Bref, je me sens minuscule à côté d’elle. De petites voix me susurrent que ce n’est pas la peine de faire ce que je fais, puisqu’elle l’a déjà fait. Et probablement mieux que je ne le ferai jamais.
J’hésite tous les jours à me désabonner de sa newsletter.
Mais je résiste.
Je prends une grande inspiration, et je dis à ces méchants chuchoteurs internes que… oui, elle a déjà ce que je voudrais. Elle vit (de) sa passion, et c’est génial : je ne devrai pas laisser sa réussite me causer de l’incertitude. Je devrais m’en inspirer.
J’en reviens à excelsior, ce concept selon lequel la seule personne à laquelle tu dois te comparer, c’est toi-même. Je veux faire mieux que moi-même hier. Et si je n’y arrive pas aujourd’hui, j’y arriverai demain.
Je ne vois que l’extérieur de Cécile Duquenne, pas son intérieur – et comparer mon intérieur à son extérieur, ça ne sert à rien !
J’inspire. J’expire. Et je continue.
Mes pages
Sur un tout autre sujet, je voudrais comme promis t’offrir une petite découverte de mes pages du jour – des textes sans qualité littéraire, des textes du quotidien.
Comme la « règle » des pages du jour, telles qu’elles ont été théorisées par Julia Cameron, est de ne pas les relire avant 8 semaines, le bout que tu vas lire date du mois de mars.
Tu vas même avoir le droit à mes toutes premières pages, qui coïncident avec le lancement de cette newsletter. J’ai envie de mettre plein de disclaimers, de prévenir que ceci ou cela… mais tout compte fait, je vais m’en passer.
Oui, c’est très intime, mais c’est un peu ce que je promets en te mettant ces pages. Presque sans me censurer.
10/3/21
Je commence les pages du matin. Je commence plein de choses en ce moment, ce printemps est celui du renouveau ? Peut-être ! Après tout, on vient de déménager, d’emménager dans notre nouvelle maison, dans notre maison à nous. J’ai commencé ma newsletter, aussi : le premier mail part dans un peu plus d’une heure trente. Je sens l’angoisse, le stress, en surface, mais au fond, il y a de la sérénité, de la certitude, de la fierté. Merci, Nicolas Galita, tu m’as fait embrasser le « développement personnel », la philosophie remise au goût du jour.
Ça fait longtemps que je n’ai pas écrit autant à la main, je sens que mon poignet se crispe et ma main n’arrive pas à suivre la vitesse de mes pensées. D’habitude, j’écris toujours au crayon dans mes carnets, mais je me suis dit que pour les pages du matin, cette forme d’écriture automatique, le stylo ferait davantage l’affaire. Peut-être que je changerai de couleur en fonction des jours.
En fin de compte, j’ai choisi les feutres, et je change en effet de couleur tous les jours !
Comme je ne dois pas relire ce que j’écris avant 8 semaines – 8 semaines ! C’est long ! Ça m’amène au 5 mai ! – il faut que je fasse attention à ne pas transformer les pages du matin en to-do list… sinon, je vais me rendre compte de ce que j’ai oublié de faire 8 semaines plus tard. Du coup, je viens de noter sur ma liste (ai-je parlé de ma passion des listes ?) […] de faire la marque sur la cuve à fioul. C’est fait ! J’ai mal au poignet.
Le chien des voisins aboie donc Gally l’imite et comme elle est dedans et que nous manquons encore de meubles, ça résonne de fou ! J’ai si mal au poignet !
Que dire ? Je n’en suis qu’à la moitié de mes pages. Est-ce que j’ai le droit de faire des retours à la ligne, au fait ? Y a-t-il des règles ou des non-règles à respecter ? Pourquoi est-ce que dès que je m’essaie à un exercice de type journal intime, je me prends à imaginer des chercheurs qui les liront un jour ? C’est si prétentieux et un peu idéaliste. J’ai toujours en tête les pages de Susan Sontag sur lesquelles j’avais travaillé en M1 avec Lou pour le coups d’anglais de Mme N. Ça avait été une telle révélation !
Susan Sontag (1933-2004) fut une essayiste, romancière et militante américaine juive et lesbienne (tout un programme !). Je recommande la lecture de son journal intime, publié de façon posthume par son fils. Une petite citation d’elle pour le plaisir :
Je m'intéresse seulement aux gens qui sont engagés dans un projet de transformation de soi.
Reprenons mes pages :
J’avais adoré faire cet exposé et Lou était si chouette et admirable. Enfin, du moins, moi je l’admirais. Elle m’a beaucoup aidée, guidée, conseillée. J’avoue, j’aimerais bien qu’elle s’abonne à ma newsletter.
Ce n’est pas le cas, mais d’un autre côté, je ne lui ai pas proposé en personne. Est-ce qu’elle se souvient encore de moi, de toute façon ?
J’ai mal au poignet, vivement que je le re-muscle pour que ces pages perdent leur difficulté physique. Pour le moment, en tous cas, c’est facile d’écrire du point de vue mental. Trop facile, peut-être ? Est-ce que c’est parce que je le vois comme un achievement ? La question est : vais-je réussir à me discipliner assez pour faire mes 3 pages tous les jours ?
Presque ! J’ai rarement loupé des jours !
Et puisqu’il s’agit d’un lavage de cerveau, est-ce que je dois le faire avant ou après le lavage du corps ? L’autrice, dont je n’ai pas le nom là [Julia Cameron], parlait d’écrire au saut du lit. Est-ce qu’il m’est permis de le faire plutôt dans l’heure qui suit mon réveil ou est-ce que c’est de la triche ? Et puis, est-ce que je peux écrire plus de 3 pages si j’ai trop de choses à purger ? Là par exemple, j’écris dans mon cahier A5. Lorsque l’autrice parle de « 3 pages », est-ce qu’elle parle de 3 pages pour la trinité ou pour la quantité de mots qu’on peut inscrire ? Parce que si c’est 3 pages A4, je devrais remplir 6 pages de ce carnet. Je pense que je me pose trop de questions (duh).
D’un autre côté, c’était bien 3 pages A4, comme je l’ai découvert lorsque j’ai écrit mon mail sur mon rythme de travail. Je faisais bien de me poser la question…
Je vais donc me dire que j’écrirai au moins 3 pages de ce carnet. Si j’ai encore des choses à coucher sur la feuille, je le ferai. On n’arrête pas de se laver parce qu’on s’est lavé pendant le temps moyen de récurage s’il reste de la saleté.
Voilà, j’ai déjà rempli 3 pages et je n’ai pas fini. Presque, mais pas encore.
Par exemple, puisque j’en parle : je vais pouvoir relancer la chaudière. Je pourrai me doucher d’ici une heure j’espère. Je n’ai vraiment pas envie d’aller au travail. Je commence à avoir faim. Il faut que je me fasse un vrai emploi du temps si je veux finir mon tome 1 à temps pour le concours. Est-ce que je ne serais pas encore en train de procrastiner ? Ah, cette foutue résistance.
Je me suis aussi engagée à bêta-lire le livre de Nicolas Galita. Je vais le copier sur mon Kindle et lire un chapitre par jour ; j’ai jusqu’au 23 mars.
J’ai hâte que nos meubles arrivent !
Ouh, c’est dur de résister à la tentation de relire ce que j’ai écrit. Je pense que ça veut dure que j’en ai fini avec mon lavage de cerveau du jour. C’est parti pour la chaudière et le reste.
Et ce soir : Top Chef ! À demain :)
Ah, je viens de me souvenir de quelle Nathalie m’a offert ce carnet (cette phrase est incorrecte du point de vue grammatical). Il s’agit de Nathalie M., de l’entreprise X ! Trop gentille. Il faut que j’envoie un message à R. aussi. Allez hop, sur la liste.
Voilà, je ne sais pas si c’était vraiment très intéressant, mais j’espère que ça t’a au moins fait rire.
Même si je ne suis pas sûre de réitérer l’exercice, je trouvais qu’il était pertinent dans le cadre d’un mail où je parle de mon intimité.
Bonne fin de semaine !
Ça ressemble vachement au genre de choses que j'aurais pu écrire dans mes pages.
Je me suis toujours demandée si je les faisaient bien. Moi aussi je me suis posée 10 000 questions au début, hahah.
Pour moi par contre, impossible de les faire au saut du lit! Si je fais ça je me rendore directe sur mes pages 😅