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J’ai une tendresse particulière pour ce trope, c’est-à-dire que je l’adore. Il me fait sourire, il m’émeut quand il est bien exploité… et puis une des (très nombreuses, entendons-nous) raisons pour lesquelles mon amoureux est devenu mon amoureux, c’est parce qu’il portait une chemise rose lorsqu’on s’est rencontré la première fois !
Ce trope s’appelle « Real Men Wear Pink », littéralement « Les Vrais Hommes portent du Rose ». Une autre traduction possible serait : « Le Rose c’est Viril ».
Ce trope se retrouve tant dans diverses mythologies (grecque, nordique) que dans la pop culture, avec une surreprésentation (si on peut considérer qu’il y en a trop de représentation) dans les Annales du Disque-Monde de Terry Pratchett.
Il rassemble les personnages masculins (souvent hommes cisgenres), solitaires, brutes et/ou ultra-virils qui ont au moins un intérêt ou un passe-temps « non viril » (selon les normes sociales de genre du patriarcat, n’est-ce pas). Il peut s’agit de pâtisserie, de couture, de la couleur rose…
Parfois, cet intérêt « non-viril » est gardé secret, mais souvent ces personnages sont si imposants qu’ils n’en prennent même pas la peine : qui – qui – oserait venir lui chercher des noises à ce sujet ?
Le personnage est si manifestement « masculin » qu’il n’a pas besoin de prouver sa virilité. Mieux encore : comme il considère cet intérêt ou cette activité comme virile (puisqu’il la pratique), elle est virile. Point.
D’autres utilisent cet intérêt comme un bon prétexte pour justement déclencher des bagarres (ils font mine de se vexer d’un regard de travers juste pour le plaisir de mettre une bonne droite) (on reste viril / macho / réduit à l’utilisation de la force brute, tout de même).
Attention, ce trope ne s’applique pas aux personnages masculins « efféminés » ou encore aux doux géants (des personnages masculins puissants physiquement mais qui n’emploient jamais la force).
Quelques exemples :
Hercule, lors de l’une de ses épreuves, doit échanger sa toison de lion contre la robe de la Reine Omphale pendant un an, apprend à cette occasion le tissage… et s’aperçoit qu’il aime bien ça
Thor et Loki se travestissent pour « séduire » un géant des glaces et kiffent l’expérience
le groupe de brutes dans Raiponce (Tangled) de Disney répondent presque tous à ce critère : meurtriers sanguinaires, bandits de grand chemin, hommes craints, ils ont une affection l’un pour la confection de cupcakes ultra-mignons, l’autre pour des mini-licornes…
Carotte dans les tomes des Annales du Disque-Monde où il apparaît (je recommande au passage le visionnage de la série BBC The Watch, une superbe et hilarante adaptation) est un nain de 2m de haut, et qui doit son nom à sa physionomie en triangle inversé (épaules larges, taille fine). Il transperce de son épée un ennemi et l’enfonce également dans le mur juste derrière sur une dizaine de centimètres… et adore les travaux manuels, l’artisanat, en passant de la forge à la cuisine, l’orfèvrerie et la couture. J’adore ce personnage.
Kronk, dans le Disney Kuzco, l’Empereur Mégalo (The Emperor’s New Groove), personnage hyper-macho dans son chara-design, adore cuisiner plus que tout et son cœur se brise quand Yzma ose lui dire qu’elle a toujours détesté ses gougères aux épinards. (Il essaie donc de la tuer avec un chandelier.)
Yondu dans les Gardiens de la Galaxie (Marvel) est un mercenaire de l’espace redouté et craint, qui collectionne des petites figurines toutes mignonnes.
Je pense que j’apprécie autant ce trope parce qu’il montre que ce genre d’intérêts et d’activités ne sont justement pas genrées et qu’elles n’ôtent rien à la valeur d’un « homme viril, un vrai » (en admettant qu’on continue à considérer la virilité comme une valeur masculine, hein). C’est rarement tourné en ridicule, justement parce que ces personnages machos intimident bien trop cielles qui oseraient tenter de se moquer d’eux.
Et j’ai envie de penser que ça peut permettre à des petits garçons éduqués dans un moule patriarcal et viriliste que ces intérêts sont plus que valables. Au moins, ça leur donne des exemples à donner, s’ils ont besoin de s’en justifier.
Et vous, que pensez-vous de ce trope ?
PS : pour le plaisir, cette petite BD de Swords Comic en bonus !
Coeur sur Kronk forever.